Vers l’an mille et encore vers la fin du XIIe siècle, Saint-Paul-des-Champs est une campagne d’où émerge un petit bourg serré autour de l’église construite sur le monceau, ancienne fondation érigée en paroisse en 1080. La voie qui, à partir du Grand-Pont [pont Notre-Dame], rejoint le monceau franchit l’enceinte du XIe siècle à la porte Baudoyer [au croisement actuel de la rue François-Miron et de la rue du Pont-Louis-Philippe] [1]. De la porte Baudoyer, « sort l’ancienne voie romaine de la rue Saint-Antoine (rue François-Miron) mais aussi des chemins de terre : rue de Jouy, rue Charlemagne […] peut-être aussi la rue du Figuier, enfin des transversales menant aux berges de la Seine (rue Geoffroy-l’Asnier, des Nonnains-d’Hyères, Saint-Paul) où s’activait le commerce fluvial [2]. » Ces chemins de terre vont être à l’origine des voies qui animeront l’extension de la ville vers Saint-Paul, la rue Saint-Paul marquant la limite de cette croissance jusqu’au XVIe siècle [3].

Les lignes de croissance sont ici l’ancienne voie romaine mais aussi la Seine elle-même à partir de la création du port de la Grève en 1141 et de son développement vers l’amont au XIIe siècle. Entre la Grève et la tour Barbeau – qui marque le point d’aboutissement de l’enceinte de Philippe-Auguste sur la rivière – « sont débarqués vins de Bourgogne, blé, foin de Picardie, bûches et fagots de Gentilly, pavés de grès du Vexin, sel et charbon […] A l’arrière des pontons, celliers, entrepôts, chantiers en plein air, tavernes et hôtelleries forment un vaste lieu de transactions [4] » tout au long de la rue de la Mortellerie [rue de l’Hôtel-de-Ville] qui joint la place de Grève à la poterne des Barrés.

En retrait du port, la ville se développe dans la limite de l’enceinte de Philippe-Auguste, qu’elle déborde à peine à la fin du XIIIe siècle.

Intra-muros, l’espace disponible rend possible l’installation de communautés religieuses, telles les béguines de l’Ave Maria en 1230 [dans le quadrilatère formé par l’enceinte de Philippe-Auguste et les rues de l’Ave-Maria, du Fauconnier, Charlemagne],  et des hôtels de l’aristocratie, comme  l’hôtel du roi de Sicile [dans le quadrilatère formé par l’enceinte de Philippe-Auguste et les rues du Roi-de-Sicile, Pavé, des Francs-Bourgeois] que fait bâtir en 1266, Charles d’Anjou, frère de Saint Louis.

Charles d’Anjou, roi de Sicile, et le pape Martin IV.
Grandes chroniques de France, XIVe siècle.

Extra-muros, sont construits les hôtels de l’archevêque  de Sens et de l’abbé de Saint-Maur – embryons de la future résidence royale de Saint-Paul (voir Paris 1300-1450, vue d’ensemble).

Juste au-delà de la porte Baudet de la nouvelle enceinte, l’église Sainte-Catherine-du-Val-des-Ecoliers – à l’emplacement actuel de la rue d’Ormesson [5] – est fondée en 1229 par Blanche de Castille et le jeune roi Louis IX (1226-1270), en réalisation du vœu des sergents d’armes de la garde de Philippe-Auguste. Lors de la bataille de Bouvines, en 1214, ils avaient promis d’élever à Paris une chapelle dédiée à Sainte-Catherine s’ils étaient victorieux. Sur des terrains donnés par deux laïcs, Nicolas Gibouin et Pierre de Braine, un ensemble conventuel s’est construit – inscrit dans un quadrilatère suivant les actuelles rues Saint-Antoine, de Sévigné, de Jarente et de Turenne [6]. Cet ensemble comprend un cloître,  les bâtiments conventuels, la maison du prieur entourée d’un jardin, un réfectoire et un petit cimetière. Les desservants sont les religieux du Val-des-Ecoliers. Fondée en 1201 par quatre augustins originaires de Paris dans une vallée stérile près de Langres, cette communauté s’installe à Paris en 1229 « pour faciliter aux jeunes gens de leur Ordre les moyens de vaquer à leurs études [7] ». Elle va jouer, au XVIe siècle, un rôle important dans la création du futur quartier du Marais en décidant du lotissement des terrains de culture qui forment la Culture Sainte-Catherine au nord de l’église (voir La Couture Sainte-Catherine).

CARTES

Michel Huard, Atlas historique de Paris :

BIBLIOGRAPHIE

CHADYCH Danielle, LEBORGNE Dominique, Atlas de Paris. Evolution d’un paysage urbain, Paris, Editions Parigramme / Compagnie parisienne du livre, 1999, 199 p.

GAGNEUX Renaud, PROUVOST Denis, Sur les traces des enceintes de Paris, Paris, Editions Parigramme / Compagnie parisienne du livre, 2004, 241 p.

HILLAIRET Jacques, Dictionnaire historique des rues de Paris, Paris, Editions de Minuit, 1963, 3 vol.

JAILLOT Jean-Baptiste (RENOU DE CHAUVIGNE Michel dit) [1710-1780], FLEURY Michel [1923-2002], Recherches critiques, historiques et topographiques sur la Ville de Paris, Paris, Berger-Levrault, 1977, 5 vol.

ROULEAU Bernard, Le tracé des rues de Paris, Paris, Centre National de la Recherche Scientifique, 1975, 129 p. [1ère édition.1967]

NOTES

[1] GAGNEUX 2004, p. 16

[2] ROULEAU 1975, p. 47

[3] ROULEAU 1975, p. 47

[4] CHADYCH 1999, p. 36

[5] HILLAIRET 1963, I, p. 274

[6] HILLAIRET 1963, I, p. 274

[7] JAILLOT 1778, 15ème quartier, p. 16

ILLUSTRATION

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